Le personnage central de l’affaire de dopage « Puerto » dans le cyclisme en 2006, a déclaré avoir fourni des produits au champion olympique 1992 du 1 500 m, Fermin Cacho. Et avoir eu des liens avec certains grands clubs espagnols de football.
Ceux qui espéraient des révélations fracassantes ont dû passer leur chemin. Très attendu par le milieu du sport, l’entretien de l’ancien médecin Eufemiano Fuentes, diffusé dimanche 28 mars à la télévision espagnole, a, finalement, donné lieu à des déclarations aussi troublantes qu’évasives.
Le personnage central de l’affaire de dopage « Puerto » dans le cyclisme en 2006, a déclaré notamment avoir fourni des produits pour améliorer ses performances au champion olympique 1992 du 1 500 m, l’Espagnol Fermin Cacho. Dans cet entretien à la chaîne Sexta, le médecin espagnol, acquitté en appel en 2016 par la justice espagnole, assure avoir prescrit à l’athlète « tout ce qu’il y avait à cette époque », notamment « des expanseurs du volume plasmatique, des réducteurs d’acide lactique, des stimulants naturels de la testostérone ou des acides aminés ».
« Je tiens à nuancer, on ne fait pas d’un âne un cheval de course, le fait qu’à un moment j’ai aidé, conseillé ou prescrit un traitement pour améliorer sa performance ne veut pas dire que c’est pour ça qu’il a gagné ce qu’il a gagné », a déclaré M. Fuentes, pour qui M. Cacho est un « athlète et un coureur exceptionnel ».
« Des médailles tomberaient »
Dans la même interview, M. Fuentes a déclaré que s’il dévoilait tout ce qu’il savait sur les Jeux de Barcelone en 1992, « des médailles tomberaient », tout en ajoutant : « C’est pour ça que je ne veux pas le dire. »
« Je crois que oui [il y a eu du dopage à Barcelone en 1992], mais je ne peux pas le prouver », a-t-il poursuivi. « Ce que je devrais dire, c’est que je sais que des médaillés ont eu recours à des substances dopantes, mais vingt-huit ans après, c’est quasiment impossible à démontrer, et cela peut faire l’objet d’une plainte. En disant quelque chose que l’on ne peut pas démontrer, on peut se retrouver au tribunal, et ça, je ne le veux pas. »
Fuentes, qui a travaillé pour la Fédération espagnole d’athlétisme, des clubs de football et des équipes cyclistes, a révélé avoir voyagé, à l’époque, dans les pays de l’ancien bloc communiste.
« Durant ces voyages, j’ai appris des techniques de dopage. Ils étaient financés par les organismes avec qui j’étais sous contrat et l’un d’eux était la fédération [d’athlétisme] », a-t-il affirmé. « J’ai utilisé des médicaments dopants avant qu’ils ne soient interdits et quand ils le devenaient, j’en utilisais d’autres pour ne pas franchir la ligne rouge », a-t-il ajouté. « Je ne suis pas un délinquant », s’est-il défendu.
Un rôle trouble dans des clubs de football
L’ancien médecin a également déclaré avoir travaillé de manière informelle ou avoir été approché par certains clubs de foot de première importance en Espagne. Confronté à un document publié par le quotidien El Pais faisant état d’une supposée comptabilité occulte à la Real Sociedad où apparaissaient des versements suspects et des annotations de sa part, le docteur Fuentes s’est défendu de manière ambiguë.
« Je vois ce document et je reconnais que cette lettre est la mienne, a-t-il dit. Je n’ai pas été le médecin de la Real Sociedad mais [à la vue de ce document], on peut penser que je les ai conseillés d’une manière ou d’une autre. »
En 2013, l’ancien président de la Real Sociedad – de janvier à décembre 2008 –, Inaki Badiola, avait affirmé dans un entretien au journal AS que ses prédécesseurs disposaient d’un réseau d’achat de produits dopants dont « Eufemiano Fuentes pourrait bien en être le fournisseur ». La direction de la Real Sociedad avait rejeté ces accusations, tout comme le président du club entre 2001 et 2005, José Luis Astiazaran.
Le docteur Fuentes travaillait de manière tout à fait officielle pour les clubs de l’Union Deportiva de Las Palmas, Universidad de Las Palmas et Elche, mais « officieusement j’étais parfois embauché ou sollicité [par des équipes], car il n’y avait pas de contrats, pour conseiller leurs techniciens, leurs médecins sur le contrôle, la récupération et le suivi de leurs joueurs ». Fuentes a également précisé qu’il avait été approché par des équipes « de niveau Ligue des champions », mais qu’il n’avait travaillé avec aucune d’entre elles.Dopage : l’AMA ne sait pas quoi faire des poches de sang de l’affaire Puerto
Le médecin, âgé de 66 ans aujourd’hui, a encore dit qu’il avait eu quelques contacts avec le FC Barcelone mais sans suite. Il est resté, en revanche, plus ambigu quand il a été interrogé sur une éventuelle collaboration avec le Real Madrid.
« Je ne vais pas répondre à cette question, mais cela ne veut pas dire que c’était le cas, j’ai déjà dû témoigner dans un procès sur cette question et j’avais dit non, donc [aujourd’hui] je te dis non », a-t-il répondu au journaliste de La Sexta Jordi Evole. Eufemiano Fuentes faisait référence à la procédure en diffamation à l’issue de laquelle Le Monde avait été condamné en 2014 par la cour d’appel de Madrid à indemniser le Real pour avoir évoqué en 2006 des liens potentiels entre le médecin et le club.
Le Monde avec AFP