Mboro Beuno, village situé dans la commune de Darou Khoudoss, manque de tout au grand dam des populations qui ne savent plus encore à quel saint se vouer.
Par Ndèye Fatou NIANG (Correspondante) – «Est-ce qu’en réalité nous faisons partie de la commune de Darou Khoudoss ?» C’est la question que se posent les populations de Mboro Beuno, un village situé dans la commune de Darou Khoudoss dans le département de Tivaouane. Cette question traduit toute l’exaspération des habitants de cette localité, qui sont plongés dans la précarité et la ruralité malgré la politique dite de communalisation universelle portée par l’Etat central dans le cadre de la mise œuvre de l’Acte 3 de la décentralisation. Et les promesses de la réforme n’ont rien apporté.
Dans ce village enclavé, tout ou presque fait défaut. Aucune infrastructure ou service social de base pour soulager ces populations pour qui la communalisation universelle reste encore un vain mot. Le bâtiment décrépi, qui sert d’école primaire, est la preuve du calvaire que vivent au quotidien les populations de ce village, perdu au milieu de nulle part. Serigne Mor Tine, directeur de l’école de Mboro Beuno, se désole : «Nous avons des locaux délabrés et depuis 20 ans qu’ils ont été construits, nous n’avons pas eu cinq bacheliers à cause de la précarité des conditions d’études des élèves.» Et les conséquences sont terribles : «Les élèves préfèrent plutôt les périmètres agricoles que les écoles. L’école peut avoir 100 inscrits en début d’année mais à la fin nous enregistrons au moins 20 abandons.» L’enseignant insiste sur «l’urgente nécessité qu’il y a de doter la commune d’une nouvelle infrastructure éducative».
A ce titre, explique M. Tine, «nous avons des partenaires qui veulent construire des salles de classe pour l’école mais nous avons un problème de site parce que les autorités nous signalent que le village est dans le domaine de la forêt classée». Ce calvaire n’est pourtant rien comparé à ce que vivent les femmes de cette bourgade.
Elles sont obligées de parcourir un peu plus de cinq kilomètres et parfois à pied ou en charrette pour rallier le poste de santé de la commune de Mboro pour les besoins de leurs visites prénatales. «Beaucoup de femmes ont perdu la vie à cause de ces conditions pénibles», fait savoir Fatou Sow. Quid de la disponibilité de l’eau potable qui est une denrée rare ? «Nous n’en disposons pas. L’eau que nous utilisons au niveau des puits est noire et impropre à la consommation mais nous sommes obligés de la boire parce que nous n’avons pas le choix», explique Fatou Sow.
Et la liste des préoccupations est loin d’être exhaustive. Pour Abdoulaye Bâ, responsable politique de la zone, venu prêter main forte à ses camarades lors de cette manifestation, cette situation de précarité qui sévit à Mboro Beuno, est aggravée par l’inaction de la commune de Darou Khoudoss de travailler pour mettre dans de très bonnes conditions ses populations. «Notre village manque de tout en termes de développement et d’équipement en infrastructures sociales de base. Beaucoup d’élèves, faute de possibilité de poursuivre leurs cours, sont obligés d’abandonner les classes pour aller faire autre chose. Et si Mboro Beuno en est encore à cette situation, c’est parce que nous avons des élus qui ne travaillent pas», enchaîne Abdoulaye Ba. Pis, regrette-t-il, «plusieurs hectares de terres ont été octroyés à la Grande Côte opérations pour l’exploitation du zircon.
Elle tire des milliards et des milliards dans notre sous-sol alors que les populations ne voient pas les retombées. Nous sommes de plus en plus pauvres. Elle ne forme pas encore moins ne recrute nos jeunes.» Pendant ce temps, regrette M. Bâ, «Mboro Beuno, un village qui existe depuis 150 ans, ne peut pas disposer d’un site pour abriter les nouveaux locaux de son école parce que les autorités disent que nous sommes dans un périmètre de restauration de la zone des Niayes ou domaine de la forêt classée». Ainsi, il demande au chef de l’Etat de «déclassifier notre village pour nous permettre de vivre dans de meilleures conditions». Surtout que la principale activité de la zone, c’est le maraîchage qui ne décolle pas.
A cause des difficultés d’accès, les produits pourrissent à l’intérieur des champs. «Nous n’avons pas de marché pour écouler nos produits. Nous sommes obligés de faire 40 km pour rallier Notto Gouye Diama pour vendre nos produits», précise Abdoulaye Bâ, qui a aussi décrié «le non-accès des femmes et des jeunes au crédit.
Lequel accès pourrait leur permettre d’entreprendre des activités génératrices de revenus, mais aussi et surtout fixer les jeunes dans le terroir».