Les élections locales ont été encore reportées. Pour la troisième fois. Inédit ! Pis, personne ne sait quand est ce qu’elles se tiendront. Conséquences : les 554 communes que compte le Sénégal vont continuer à être administrées par des élus jouissant de la légalité. Certes ! Mais qui n’auront aucune légitimité, parce qu’ils ne sont plus sûrs qu’ils bénéficient toujours de la confiance du peuple, seul souverain.
Faudrait-il le rappeler que la souveraineté appartient au peuple qui l’exerce par la voie référendaire ou par la voie de ses représentants. Hélas, depuis deux ans, la classe politique sénégalaise a décidé de confisquer cette souveraineté en arguant son incapacité à aller aux élections sous des prétextes plus que fallacieux d’audit du fichier électoral et/ou de révision du processus électoral.
Une pratique devenue courante dans notre pays sans jamais démontrer sa fiabilité encore moins sa sincérité. A l’instar de plusieurs pays africains, le Sénégal s’est juste engouffré dans un copier-coller qui coûte des centaines de millions au contribuable avec des recommandations généralistes qui finissent souvent à la corbeille.
N’est ce pas c’est avec le même fichier ou presque que Macky Sall a remporté la Présidentielle de 2012 devant Abdoulaye Wade ? Ce dernier avait fait de même face à Abdou Diouf en 2000.
La bataille devrait donc être ailleurs. Notamment l’inscription massive sur les listes électorales ; l’assurance du retrait des cartes. Mais aussi et surtout la suppression ou la révision du parrainage. Même s’il s’est avéré un «mal nécessaire» qui a évité au Sénégal un désordre électoral comme ce fut le cas lors des Législatives du 30 juillet 2017. Pour la première fois, le Conseil Constitutionnel avait permis aux électeurs de «violer» le code électoral en choisissant 5 sur les 47 listes en compétition.
Une pléthore de liste qui arrangeait quand même le régime en place qui a su profiter du mode scrutin (majoritaire ou raw kaddu) au niveau départemental pour remporter la mise. Toutefois, il savait pertinemment que la multiplication des candidats -qu’il avait pourtant favorisé lors des Législatives, en parrainant certains-, allait lui être fatale pour la Présidentielle. D’où, l’utilisation à fond d’un tamis pour ne retenir que cinq candidats. La suite est connue. Le résultat étant atteint, il fallait alors lancer le dialogue national et/ou politique, avec la bénédiction de l’opposition et de la société civile. Le régime ne pouvait espérer mieux. Mais depuis, on assiste à un quiproquo qui se traduit par d’interminables blocages.
Les différents protagonistes se rejettent la responsabilité. Quant aux élus, aussi bien de l’opposition que du pouvoir, ils se frottent les mains avec un bonus qui leur permet de jouir tranquillement de leurs avantages. Jusqu’à l’aliénation des terres avec la complicité de l’autorité déconcentrée.
Finalement, tout le monde y trouve son compte. Sauf bien sûr le peuple qui assiste impuissant à la confiscation de sa souveraineté.
Ainsi, on continue de jouer avec la loi et le droit qui ne servent plus à assainir les mœurs politiques encore à consolider les acquis démocratiques. Au contraire ! La fin justifiant les moyens, l’organisation d’élections à date échue n’est plus considérée comme une priorité absolue. On peut même se permettre d’outrepasser ses compétences. Me Abdoulaye Wade avait pris comme prétexte les dégâts causés par les pluies diluviennes ayant débouché sur son plan Jaxaay, pour proroger les mandats des députés. Macky Sall lui, n’a pas eu à recourir à un cas de force majeure, pour reporter les Locales. La culture de la démission n’existant pas, non plus, depuis le départ de Talla Sylla de l’Hémicycle, les élus locaux peuvent rester au pouvoir jusqu’en 2024. Si on en croit aux confidences de Me El Hadji Diouf. Tout le monde est coupable. Mais personne n’est responsable.