Alors qu’une porte de sortie honorable lui avait été offerte avec un poste prestigieux à l’international, Macky Sall a choisi de quitter son rôle pour renouer avec la vie politique sénégalaise. Dès l’annonce des législatives anticipées, l’ancien président, qui avait quitté le pouvoir il y a seulement six mois, a fait son retour fracassant dans l’arène politique.
Sa décision de ne pas briguer un troisième mandat sous la constitution révisée de son premier quinquennat avait déjà suscité de vives tensions. Après avoir été nommé en novembre 2023 par Emmanuel Macron comme envoyé spécial du Pacte de Paris pour les Peuples et la Planète (4P), Macky Sall a démissionné de ce poste en octobre 2024. Il a justifié son retrait par un souci d’éviter toute incompatibilité avec ses ambitions politiques au Sénégal.
Investi tête de liste de la coalition « Takku-Wallou », principale opposition aux nouvelles autorités, Macky Sall a opté pour une candidature aux législatives prévues le 17 novembre 2024. Cependant, cette démarche suscite la controverse, notamment en raison de sa résidence au Maroc depuis mars, sans qu’aucune date de retour au Sénégal n’ait été annoncée.
Qu’est-ce qui fait courir Macky Sall ?
Les élections législatives de novembre sont cruciales pour l’avenir politique de Macky Sall. Sa candidature semble être une stratégie de survie face à une éventuelle traque judiciaire. Crainte ou stratégie prudente, l’ancien président évite pour l’instant de revenir au Sénégal pour mener campagne, redoutant une arrestation.
Selon l’article 101 de la Constitution sénégalaise, un président peut être jugé uniquement pour « haute trahison ». Cependant, cette notion reste floue dans le texte constitutionnel, tout comme dans la loi organique encadrant la Haute Cour de justice, seule habilitée à juger un chef d’État. La composition de cette cour, rarement sollicitée depuis l’indépendance, dépend de la désignation des huit magistrats et leurs suppléants par la nouvelle Assemblée. Ainsi, l’issue des législatives jouera un rôle clé dans le sort judiciaire potentiel de Macky Sall.
Retour de bâton ?
Sous le mandat de Macky Sall, Ousmane Sonko et d’autres figures de l’actuel pouvoir, dont le président Diomaye Faye, ont été poursuivis. Depuis son départ, ce sont désormais des proches de Macky Sall qui se trouvent dans le collimateur des nouvelles autorités pour des accusations de corruption et de détournement de fonds publics.
Cette situation soulève des questions sur la difficulté des transitions politiques en Afrique, où les garanties pour les anciens dirigeants et leurs collaborateurs restent floues. Accusé par le nouveau régime d’avoir manipulé les chiffres des finances publiques, Macky Sall a rejeté ces accusations fin octobre, niant toute irrégularité. Pourtant, le Premier ministre Ousmane Sonko l’a directement accusé, en septembre, d’avoir maquillé les données concernant la dette publique et le déficit budgétaire.
Et après ?
En mars 2024, Macky Sall avait surpris en annonçant son retrait de la présidentielle, invoquant un « code d’honneur » malgré sa possibilité légale de se présenter. Si les législatives marquent une nouvelle étape dans son retour politique, elles pourraient être un prélude à une candidature pour la présidentielle de 2029, à moins d’une déchéance de ses droits civiques.
Comme le rappelle un dicton populaire : « Les plus forts doivent savoir qu’ils ne sont pas capables de lutter contre le cours de la vie. » Macky Sall semble pourtant prêt à défier ce cours, se positionnant comme un acteur incontournable de la scène politique sénégalaise, quitte à jouer le rôle du trouble-fête face à ses anciens opposants.