Malgré le tarissement du financement international, plusieurs projets de centrales à charbon n’ont pas été abandonnés au Sud du Sahara. Mais à l’échelle mondiale, la région ne compte que 3% des projets en phase de pré-construction.
L’engagement de la Chine à ne plus financer et construire de nouvelles centrales à charbon en dehors de son territoire a ralenti, mais n’a pas complètement stoppé les projets en phase de pré-construction en Afrique subsaharienne, selon un rapport publié le 5 avril par l’ONG Global Energy Monitor.
Le rapport précise que l’Afrique compte des projets de centrales à charbon en phase de pré-construction d’une capacité totale de 9,7 gigawatts (GW), ce qui représente 3% seulement des capacités planifiées à l’échelle mondiale. Ces centrales, qui sont majoritairement de petite taille, sont réparties sur onze pays du continent.
Dans trois pays (Madagascar, Niger et Tanzanie), l’exécution de ces projets dépend cependant du soutien chinois. La réalisation ces projets demeure très hypothétique puisque le développement des capacités au charbon soutenues par la Chine à l’étranger est en diminution.
19% (21 GW) des 108 GW de capacités en pré-construction à l’étranger avec un appui chinois, sous forme de financements ou encore contrats d’ingénierie, d’approvisionnement et de construction (IAC), ont été déjà abandonnés en conformité avec l’engagement annoncé en septembre 2021 par l’empire du Milieu. Près de 40 % des projets de centrales à charbon soutenus par la Chine ont cependant progressé. Pékin a expliqué que ces projets qui continuent à progresser « ne sont pas considérés comme nouveaux, puisqu’ils avaient bouclé leurs schémas de financement ou étaient déjà en construction au moment de l’annonce faite en septembre 2021 ».
Des canaux de financement alternatifs
Bien que le financement international se soit globalement tari, le soutien au charbon peut arriver à travers de multiples canaux comme les institutions financières privées. Conséquence : plusieurs projets de centrales à charbon n’ont pas été abandonnés en Afrique subsaharienne, où 50 GW de capacités sont en opération et près de 10 GW supplémentaires en développement.
En 2021, l’avenir du charbon dans cette région était en mauvaise posture alors que des milliards de dollars de financements climatiques internationaux étaient promis et que plusieurs décisions de compagnies d’arrêter leurs installations au charbon étaient annoncées. Cependant, il est apparu clairement en 2022 que la balance n’a pas encore basculé en faveur des sources alternatives d’énergies renouvelables. D’autant plus que des accords qui n’étaient pas contraignants ont été annulés et des intérêts politiques et économiques puissants ont permis même à des projets non avantageux de se poursuivre.
En Afrique du Sud par exemple, la centrale de Musina-Makhado qui devait être remplacée par des projets solaires fin 2022, semble être à nouveau d’actualité dans le cadre d’un projet de zone économique spéciale. La communauté locale et les activistes environnementaux ont mis en lumière que les mines de charbon proches de cette centrale devaient reprendre la production cette année. Tel est aussi le cas du projet très impopulaire de la centrale de Beifa au Zimbabwe, qui est aussi jumelé avec un projet de mine voisine.
De son côté, la compagnie minière Rio Zimbabwe Ltd (RioZim) s’efforce encore d’obtenir des financements pour la construction de la centrale à charbon de Sengwa (2,8 GW), et le projet reste actif malgré les obstacles.
La capacité du parc mondial a augmenté en 2022
Le rapport souligne d’autre part que des victoires devant les tribunaux et une forte opposition du public ont aussi contribué à freiner certains projets. Il relève également des signes d’espoir dans la région en 2022, avec l’annulation de la centrale de Lamu au Kenya et du projet Mbeya en Tanzanie, tandis que la centrale de Sechaba au Botswana semble aussi à l’arrêt.
Global Energy Monitor indique par ailleurs que près de 26 GW de centrales à charbon ont été arrêtées dans le monde en 2022, mais 45,5 GW d’installations utilisant ce combustible très polluant ont été mises en service dans le même temps, dont 59% en Chine.
Ainsi, la puissance du parc mondial de centrales à charbon a augmenté de 19,5 GW, soit une croissance annuelle d’un peu moins de 1%.
Toutes les régions du monde en dehors de l’Asie Centrale et de la Chine ont aussi vu un déclin ou une stagnation du volume de nouvelles capacités au charbon en phase de pré-construction durant l’année écoulée.
Le total des capacités de production électrique au charbon en développement (en incluant les projets annoncés, en phase d’études, ayant un permis de construire approuvé, ou en phase de construction) tourne autour de 500 GW depuis 2019, une chute significative par rapport aux 1576 GW en développement en 2014. Ce chiffre avait atteint son plus bas niveau en 2021, à 479,4 GW, avant de remonter à 537,1 GW en 2022, ce qui représente une augmentation de 12% due principalement à la Chine.